lundi 23 septembre 2019

Notre temps manque d'enthousiasme: l'écologie de l'enfance face à l'urgence climatique

« L'urgence d'une nouvelle attitude envers l'enfance n'a d'égale que l'urgence climatique. 
Elles sont reliées, car l'avenir en dépend. » ~ André Stern


Notre temps manque d'enthousiasme.

Nous avons si peur devant l'enfant.
L'enfant est logique, lucide.
Nous, adultes, plus encore ceux des générations précédentes, avons été conditionnés à ne pas être les enfants que nous étions.

J'OSE la vie ! - journaljose.blogspot.com
Lever le store sur la lumière du jour
Quand nos enfants étaient petits, mon mari me disait qu'on était une « génération-tampon »: même si notre enfance n'avait pas toujours été respectée, on devait préserver celle de nos enfants. Je savais qu'il avait raison mais je ne réalisais pas encore alors à quel point.

Quand nos enfants étaient petits, j'avais l'impression qu'ils avaient un don pour nous « réveiller », ou réveiller des parties de nous qui semblaient dormir quelque part. Ce n'est bien sûr pas le cas mais l'image de l'enfant levant le store sur la lumière du jour, le dimanche matin, quand le soleil est là depuis longtemps et que les parents dorment encore, ça me parlait. Si ça vous est arrivé, vous savez que ça réveille drôlement et que ça brûle les yeux de passer abruptement de l'obscurité aux rayons du soleil. Lorsque viennent ensuite des bisous tout doux ou un petit déjeuner servi au lit (oui, parfois, on y avait droit !), alors on se frotte un peu les yeux et on sourit. Mais ce n'est pas de ça dont je parle aujourd'hui. Je parle de notre difficulté à regarder en face ce qui ne va pas, ce qui ne va plus. Je sais, c'est difficile d'ouvrir les yeux quand on nous demande de les fermer depuis l'enfance. Mais au bord du gouffre, alors qu'on en est aujourd'hui à 8 ½ ans d'une catastrophe annoncée, allons-nous vraiment faire taire l'enfant, lui raconter une histoire pour le remettre au lit, pour fermer les yeux et dormir encore un peu ?

L'idée fait peur mais je ne suis pas pour autant surprise d'entendre des voix d'adultes s'élever et exiger le silence. Depuis que je suis mère, j'en ai entendu «des vertes et des pas mûres» autour de nous devant les propos ou les choix de nos enfants: végétarisme puis véganisme, équité, éthique, justice, écologie; refus des faux-semblants; indignation devant la bêtise, l'inutile, la destruction de la nature pour faire toujours plus, d'immeubles, de produits, de profit... À vivre auprès d'eux, on a ré-appris à ouvrir les yeux. Et les oreilles. Écouter, entendre, comprendre, respecter leurs choix, parfaitement cohérents d'ailleurs. De leur côté, ils n'ont pu manquer de voir que c'était plutôt rare, en fait, que l'Enfant soit entendu. Surpris, ils ont cherché pourquoi, posé des questions. Je ne savais pas vraiment, j'ai cherché avec eux. Pourquoi les adultes n'écoutent pas les enfants ? Pourquoi moi, je ne les écoutais pas, avant ? Réponse simple: parce que j'avais été éduquée ainsi. Les adultes parlent et décident, les enfants écoutent et obéissent.

C'est triste de réaliser qu'on nous a éduqué à taire notre élan spontané pour découvrir le monde, pour le comprendre et y agir. Difficile d'entendre, de regarder les choses en face, quand on a appris depuis tout-petits à ne pas entendre, ne pas regarder, ne pas dire les choses comme elles sont. Les « c'est comme ça et pas autrement » ou autres « c'est la vie » sont un lourd bagage qu'on promène de l'inutile au dangereux. On le voit aujourd'hui avec l'environnement (quoique certaines personnes en parlaient déjà il y a 30 ans...). Ça fait mal de réaliser que ce sont nos (in)actions – ou celles qu'on a laissées faire – qui nous ont conduits à ce marasme. Ça fait plus mal encore quand on n'arrive plus à se regarder dans le miroir, que notre quotidien n'est pas aligné sur nos convictions, que nos enfants en souffrent, et qu'ils vont en souffrir encore plus quand on ne sera plus là. Alors, que faire ?
J'OSE la vie ! - journaljose.blogspot.com
Lever du soleil sur la mer
Comment être la mère, le père, l'adulte qu'on veut être ? Il n'y a pas de recette magique mais ce qui peut aider, c'est de réaliser qu'on n'aurait pas fait les mêmes choix si on nous avait laissé baigner dans la logique et la cohérence de notre enfance, si on avait répondu à nos questions de façon sérieuse, si on avait cherché avec nous au besoin. Prendre conscience de cela, c'est ouvrir une porte pour évacuer colère et sentiment de culpabilité et laisser entrer des sentiments plus confortables : responsabilité, envie d'agir, enthousiasme.

En matière d'enthousiasme, l'enfant est champion. Tout-petit, l'enfant vit une tempête d'enthousiasme toutes les 2 à 3 minutes. L'adulte, lui ? 2 ou 3 fois... par an ! Si on a l'impression d'avoir oublié ce que c'est qu'être enfant, n'ayons crainte, nos dispositions natives sont toujours là. Être enfant, c'est glisser les doigts sur les touches d'un piano, manger les fraises qu'on cueille assis au milieu du champ, respirer le tilleul de juillet au coin d'une rue, courir en entendant au loin le chant du cardinal. Vivre, jouer, respirer le même air que les enfants, petits et grands. Ce chemin, que j'appelle celui « du retour à soi », n'est pas un long fleuve tranquille. (Il ne l'était pas à l'aller non plus...) Il peut parfois prendre des allures de Compostelle mais c'est la seule étape essentielle pour recouvrer la vue. Réapprendre la vie, redécouvrir le monde, les yeux grand ouverts cette fois, c'est comme regarder un film qu'on a déjà vu, on y remarque des tas de choses qu'on n'avait pas aperçues la première fois : de nouvelles couleurs, pas toujours roses mais roses aussi; de nouvelles saveurs, celles des légumes frais qui poussent sur le balcon, par exemple.
J'OSE la vie ! - journaljose.blogspot.com
Précieuse ressource, l'arbre au lever du soleil
Retrouver notre enthousiasme, tout est là. Sur ce chemin du retour à soi, le pas hésitant devient de plus en plus léger. Le cœur aussi. Redécouvrir le monde auprès de ces charmants compagnons de voyage qu'on a accueillis dans nos vies, ça fait le quotidien plus vrai, une authenticité qui fait du bien. On se sent libéré d'un stress constant, l'ancien « besoin » de compensations,de consommation inutile, s'évanouit peu à peu. 
Reste le vivre ensemble, et agir ensemble.
Pour nos enfants, pour nous tous.

Merci à nos enfants qui ont levé tous les stores sur nos yeux endormis.
Vive toutes les Greta de ce monde !
Édith

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Les commentaires sont bienvenus.
(Note: tout commentaire irrespectueux sera supprimé.)